Le projet de loi C-51 pourrait compromettre le droit à la libre expression

L’Association canadienne des employés professionnels estime que dans son libellé actuel, le projet de loi anti-terrorisme C-51 pourrait conduire les autorités à réprimer des manifestations et activités dénonçant des politiques gouvernementales, brimant ainsi le droit à la libre expression des citoyens.

Malgré les assurances données par le gouvernement conservateur, le fait que le texte du projet précise que des activités « de défense d'une cause, de protestation, de manifestation d'un désaccord ou d'expression artistique, » sont exclues de la loi, la frontière entre ce qui sera considéré comme « licite » et « illicite » est trop floue.

La possibilité de dénoncer de manière pacifique des politiques gouvernementales est l’un des remparts de la démocratie canadienne et le projet de loi C-51 semble vouloir le restreindre. Selon la présidente de l’ACEP, Emmanuelle Tremblay, « on sait que des élus du gouvernement actuel associent les écologistes dénonçant le projet de l’oléoduc Énergie Est à des « terroristes » mettant en danger la sécurité économique du Canada. Il est facile d’imaginer que ce projet de loi pourrait être invoqué par le gouvernement pour réprimer des activités légitimes d’opposition à cet oléoduc. C’est ce qui rend ce projet de loi si dangereux. »

Dangereux d’autant plus avec le dépôt en décembre dernier du projet de loi privé C-639, modifiant le code criminel pour la protection des infrastructures essentielles. En déclarant que toute « l’interférence avec des infrastructures essentielles » serait une offense criminelle, C-359 pourrait donc rendre illégale des manifestations pacifiques visant des infrastructures jugées essentielles.

En outre, ce gouvernement n’hésite pas à adopter des lois de retour au travail afin de mettre fin à des menaces de grève ou à des grèves parfaitement légales, comme on l’a vu dans les conflits touchant Postes Canada, Air Canada et le Canadien National. Ce faisant, il rend illégal d’un trait de plume un geste légal pourtant protégé par la Charte. Qu’arrivera-t-il alors aux personnes qui désirent manifester contre l’arbitraire du gouvernement? Seront-ils immédiatement associés à des terroristes et soumis à l’application de cette nouvelle loi?

Selon Mme Tremblay, « à mesure que nous avons pris connaissance du contenu du projet de loi, le soutien exprimé par les Canadiens à C-51 s’est étiolé rapidement. La meilleure solution serait de retirer complètement ce projet de loi, car les lois actuelles donnent toute la latitude qu’il faut au gouvernement pour juguler la menace terroriste. Considérant que le gouvernement a déjà indiqué qu’il tient mordicus à faire adopter C-51, il faudrait au moins qu’il accepte les modifications proposées par l’opposition et plusieurs experts afin d’éviter les dérives à la démocratie que fait peser ce projet de loi. »